Le scandale des Savings&Loans de 1989

La crise des caisses d’épargne et de crédit (Savings&Loans) des années 1990 a été une catastrophe financière significative qui a eu des conséquences considérables pour les États-Unis. Elle peut nous éclairer sur la crise des banques régionales que nous connaissons actuellement.

Leçons à tirer pour la crise actuelle des banques régionales

Introduction:

La crise des caisses d’épargne et de crédit (Savings&Loans) des années 1990 a été une catastrophe financière significative qui a eu des conséquences considérables pour les États-Unis. Elle peut nous éclairer sur la crise des banques régionales que nous connaissons actuellement. Cette période a été marquée par l’effondrement de nombreuses caisses d’épargne et de crédit, entraînant une crise économique généralisée. Tout a commencé avec le « lundi noir ». Après le crash boursier du 19 octobre 1987 (le seul jour de baisse de -20% ou plus de l’histoire), la Fed a réduit les taux de 75 points de base. Une fois la volatilité retombée, elle agit à nouveau de manière agressive pour éviter l’inflation à deux chiffres du début des années 1980, et augmente les taux de plus de 385 points de base, atteignant un pic de 9,75% au début de 1989. Ces hausses ont précipité la crise des Savings and Loan.

Le contexte historique

L’industrie des caisses d’épargne et de crédit (Savings&Loans) aux États-Unis était un élément vital du système financier, axée principalement sur la collecte de dépôts et l’octroi de prêts hypothécaires aux particuliers. La première caisse d’épargne a été créée en 1831, et pendant 40 ans, il y avait peu de caisses d’épargne, présentes uniquement dans quelques États du Midwest et de l’Est. Cette situation a changé à la fin du 19e siècle avec la croissance urbaine et la demande de logements liée à la Deuxième Révolution industrielle, ce qui a provoqué une explosion du nombre de caisses d’épargne. Dans les années 70-80’s, les S&L jouaient un rôle crucial dans la promotion de la propriété immobilière et la stimulation de la croissance économique.

À la fin des années 1970 et au début 80’s, des changements politiques visant à la déréglementation de l’industrie des caisses d’épargne et de crédit ont été mis en œuvre aux États-Unis. Ces changements comprenaient la suppression des plafonds de taux d’intérêt, permettant aux S&L d’offrir des taux d’intérêt plus élevés pour attirer les dépôts et concurrencer d’autres institutions financières. De plus, les restrictions sur les types de prêts que les S&L pouvaient accorder ont été assouplies, permettant des investissements plus risqués dans des projets immobiliers spéculatifs.

Les causes de l’effondrement

Ces institutions ont adopté des stratégies de prêt agressives, souvent sans évaluation adéquate des risques ou de garantie, ce qui a entraîné une accumulation d’actifs non performants. L’effondrement ultérieur des marchés immobiliers ont mené à l’accumulation de pertes financières importantes.

La volatilité des taux d’intérêt a également eu un impact négatif sur les S&L pendant la crise, car ils dépendaient fortement des prêts hypothécaires à taux fixe à long terme financés par des dépôts à court terme. Lorsque les taux d’intérêt ont rapidement augmenté, les S&L ont été confrontées à un déséquilibre de financement, gagnant moins d’intérêts sur les prêts hypothécaires tout en devant payer des taux plus élevés pour attirer des fonds. Cela a entraîné une rentabilité réduite et une instabilité financière, aggravant leurs difficultés financières et contribuant au trouble dans son ensemble.

Source: Federal Reserve

Lorsque le problème est devenu clairement apparent, le manque de surveillance et le laxisme règlementaire avait déjà créé un environnement malsain, propice à la fraude et aux malversations. Pour reconstituer leurs marges, les S&L se sont compromis dans des activités illégales telles que des délits d’initiés, des détournements de fonds et des investissements spéculatifs. Le manque de supervision du régulateur a permis à la crise de s’aggraver, entraînant des pertes insoutenables pour les institutions financières.

Les efforts de résolution

La Federal Savings and Loan Insurance Corporation (FSLIC) a fermé ou saisi 296 établissements de 1986 à 1989. L’effondrement des marchés immobiliers et la détérioration des portefeuilles de prêts ont conduit de nombreuses S&L à l’insolvabilité. Le fardeau est donc retombé sur les contribuables, qui ont finalement financé un plan de sauvetage avec la création de la Resolution Trust Corporation (RTC). La RTC a fermé ou saisi 747 établissements de 1989 à 1995, pour une valeur estimée autour de 400 milliards de dollars. La crise a entraîné la faillite de 32 % (1 043 sur 3 234) des caisses d’épargne et de crédit (S&L) de 1986 à 1995. Les pertes financières subies par les institutions S&L au cours de la crise ont atteint un total estimé de 160 milliards de dollars. Le plan de sauvetage financé par les contribuables s’est élevé à environ 124 milliards de dollars. L’un des sauvetages financiers les plus coûteux de l’histoire des États-Unis.

 Bank and savings & loan (S&L) failures since 1970 are often part of recessions
Source: FannieMae

Des conséquences sur l’économie dans son ensemble

Tout d’abord, l’effondrement des marchés immobiliers. La chute des valeurs immobilières et la surabondance de biens saisis ont entraîné une baisse sévère des marchés immobiliers. La défaillance de nombreuses institutions S&L ont entraîné des pertes d’emplois dans l’industrie financière. La crise a contribué à une récession économique plus large, caractérisée par une baisse de la consommation, des faillites d’entreprises, une réduction de l’investissement et des pertes d’emplois importantes, notamment dans les secteurs de la construction et de l’immobilier.

L’économie américaine a connu une récession qui a duré 8 mois de juillet 1990 à Mars 1991.

Les années 90 ont été marqués par un épisode de Crédit Crunch. Etonnement, il était plus visible sur les entreprises et les ménages que sur le secteur immobilier.

Le crédit immobilier s’est stabilisé sans décliner significativement :

Les crédit aux consommateurs a connu un déclin qui a duré près de 3 ans

Le crédit aux sociétés commerciales et industrielles a décliné prés de 4 ans

Le marché action a résisté, certainement porté par d’autres catalyseurs :

Cependant, comme nous pouvons le voir dans le graphique du S&P500 ci-dessous, malgré l’émergence de la crise (290 banques en faillite entre 86 et 89), le marché actions US a connu une hausse saine de 70% entre le creux de 87 et le pic de 90. Lorsque l’effondrement s’est généralisé fin 89, il a érodé la confiance des investisseurs dans le secteur financier, entraînant une volatilité des marchés et une baisse de la liquidité. Il plonge de prés de 20% à l’avènement de la récession en Juillet 90 et baisse jusqu’en Octobre 90 avant de reprendre une tendance haussière forte jusqu’en 2000

Qu’apprenons nous de la crise des S&L que nous devrions prendre en compte dans la crise actuelle des banques régionales américaines :

  • La Réserve fédérale (FED) augmente toujours les taux jusqu’à ce qu’elle casse quelque chose.
  • Il a fallu 10 ans pour démêler la situation des S&L. La crise des banques régionales a commencé il y a 3 mois.
  • 32 % de l’industrie S&L a fait faillite. Il y a plus de 4200 Banques Régionales aujourd’hui aux USA.
  • La crise des S&L des années 1990 sert de rappel sur les dangers d’une réglementation laxiste.
  • L’absence de gestion des risques conduit toujours à des catastrophes financières.
  • Le marché ne réagit pas forcément à ce type de crise (qui comprend faillites bancaires, immobilières, credit crunch et chômage) par une dislocation comme en 1929 ou 2008. La crise du secteur a duré 10 ans, la récession 8 mois, mais le marché actions n’a réellement corrigé que 3 mois à l’avènement de la récession, entre Juillet et Octobre 1990, et « que » de 20%. L’ampleur des crises dépend des pouvoirs publics.
  • Une structure de résolution spécifique à la situation, appelée RTC, était nécessaire pour redresser ou fermer les banques en difficulté.
  • Un renflouement avec l’argent des contribuables à hauteur de 130 Mrds (dollars de 1990) était nécessaire pour absorber les pertes. Les dégâts en terme de destruction d’actifs est encore plus important, plus de 300 Milliards $.
  • Les caisses d’épargne (S&L) et les banques régionales avaient en commun une dépendance aux dépôts. La concurrence des marchés monétaires et des autres banques a affaibli leur position de liquidité.
  • Tout comme les caisses d’épargne ont investi massivement dans les hypothèques avant que les taux n’augmentent et que des faiblesses n’apparaissent dans l’immobilier, les banques régionales américaines ont prêté massivement dans l’immobilier commercial avant que la même forme de retournement de fortune ne se manifeste.

Voilà donc pour la crise des Savings&Loans, et ce qu’elle peut nous apprendre sur la crise actuelle. J’espère que l’article vous été utile et intéressant, n’hésitez pas à partager l’article, à souscrire, et à échanger avec moi sur le sujet @slimanimehdi1 sur Twitter.

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Marché Actions : Pétrole, un canari dans la mine ?

L’OPEP a ignoré la pression politique et commerciale qui l’incitait à augmenter sa production de pétrole afin d’atténuer le resserrement du marché. Risquons-nous de manquer de pétrole ?

Après le charbon et le gaz, risquons-nous de manquer de pétrole ?

Mercredi 06 Octobre 2021,

La réunion de l’OPEP n’aurait duré que 25 minutes

L’OPEP a décidé d’ignorer la pression politique et commerciale qui l’incitait à augmenter sa production de pétrole afin d’atténuer le resserrement du marché.

Le groupe de 23 membres a déclaré le 04 Octobre dans un communiqué que beaucoup de médias ont qualifié de laconique, tenant en 10 lignes, et sans conférence de presse, qu’il augmenterait sa production d’un modeste 400 000 barils par jour en novembre, soit moins de 0,5 % de la demande mondiale. Plusieurs observateurs et analystes espéraient 400 000 barils/j supplémentaires (en sus des 400k/j décidés depuis Juillet).

Selon les analystes, le groupe est plus prudent dans ses perspectives que certains observateurs de l’industrie, qui voient la demande de pétrole dépasser largement l’offre dans les mois à venir. Un changement de politique aurait pu se heurter à une opposition de certains pays membres et ouvrir la voie à de nouvelles négociations sur les quotas des producteurs qui souhaiteraient des plafonds plus élevés. Une négociation que le prince Abdulaziz bin Salman, le ministre saoudien du pétrole, voulait très probablement éviter.

D’un autre côté, les appels pour ouvrir les vannes sont de plus en plus fortes. Des signes de détresse apparaissent sur les marchés de l’énergie :
  • La Chine manque de Charbon. Avec la détérioration des relations sino-australiennes, la Chine a cessé d’importer du charbon d’Australie et se tourne désormais vers l’Indonésie et la Mongolie. Mais, du fait du Covid-19, le trafic avec cette dernière a été perturbé. Les prix ont donc tendance à croître, au plus haut historique de 228$ la tonne.

https://www.lemonde.fr/economie/article/2021/09/28/la-chine-subit-les-plus-importantes-penuries-d-electricite-de-son-histoire-recente_6096277_3234.html

  • Avec la flambée des prix du gaz en Asie et en Europe, plusieurs pays se tournent vers le pétrole pour la génération d’électricité. Le même jour de l’annonce de l’OPEP (le 04/10/2021), Saudi Aramco a déclaré que la crise du gaz naturel stimulait déjà la demande de pétrole. La consommation de brut a augmenté d’environ 500 000 barils par jour, selon Amin Nasser, directeur général d’Aramco. Cela correspond à peu près à la production totale du Venezuela, membre de l’OPEP selon l’article du worldoil.com.

https://www.worldoil.com/news/2021/10/4/saudi-aramco-reports-higher-oil-demand-from-natural-gas-crisis

Source: Refinitiv/IEA
  • À la suite de la guerre contre le pétrole de schistes américain mené par l’Arabie saoudite en 2020, les producteurs américains sont restés disciplinés dans leurs investissements. Et les dommages causés par l’ouragan Ida en août aux infrastructures pétrolières et gazières dans le golfe du Mexique ont annulé une partie de l’impact des récentes augmentations de production de l’OPEP+.  La production dans le Golfe du Mexique est estimée à 600 K/bj en dessous de ses capacités.

Conséquence: Le déficit de l’offre par rapport à la demande est désormais évalué à 900 K/j pour le T4 2021, contre 600 k/J au T3 2021. A un moment où les stocks de l’OCDE sont de prés de 100 Million de barils en dessous de leur moyenne 2015-2019.

Source: OCDE/Refinitiv
Une nouvelle brique dans le mur d’inquiétudes pour le marché actions européen :

La décision des pays de l’OPEP de ne pas bouger ajoute un nouveau problème au mur d’inquiétudes :

  • Immobilier Chinois avec Evergrande et Fantasia Holdings
  • Power Crunch en Chine et en Europe
  • Tapering de la banque centrale Américaine et hausse des taux américains au dessus de 1.5%.
  • Commandes à l’Industrie Allemande en baisse de 8% en Aout.
  • Pression sur les émergents liée à la hausse du dollar.
  • Turbulences dans les chaines d’approvisionnement

Le pétrole progresse de plus de 100% en 1 an, et la stabilisation entre 70$ et 80$ tant espérée s’éloigne de jour en jour. Les compagnies pétrolières maintiennent leurs investissements dans l’Upstream à des niveaux réduits, et poursuivent leurs efforts pour la transition vers de nouvelles sources durables. Mais le système énergétique mondial reste dépendant à 80% des énergies fossiles, et pour limiter le réchauffement climatique, il semblerait que le pic d’investissement dans le pétrole ait largement précédé le pic de la demande.

Cours du Brent 2010-2021
Source: Refinitiv Desktop

Présent dans tous les process industriels, il pourrait alimenter un nouveau round d’inflation, mettre sous pression le pouvoir d’achat des ménages, dont l’humeur commence déjà à être impacté par les hausses des prix et les pénuries.

Les inquiétudes vis-à-vis de la stagflation augmentent. Les banques centrales pourraient se retrouver acculées. L’inflation est leur principale mission, et force est de constater que le caractère transitoire de cette dernière se révèle de plus en plus long. L’esprit de Paul Volcker est toujours vivant, Ils n’auront d’autre choix que de changer de stratégie si leur analyse de l’inflation s’avère erronée.

Le pétrole et le Feedback loop

Les mouvements de ce type sur le pétrole ont été par le passé des signaux de soucis à venir (2008, 2015, 2018). Le marché actions européen reste constructif à ce jour, nous constatons plus des rotations sectorielles (Value = Finance+Energy), des repositionnements, et pas de ventes panique. Le mur d’inquiétudes devrait à terme s’estomper (comme toujours), et les perspectives de croissance devraient s’améliorer avec l’accélération des dépenses d’investissement liée aux plans de relance US/Europe.

On aime dire que le meilleur remède contre un pétrole cher est un pétrole cher. Une hausse du prix au-dessus de 90 dollars le baril pourrait impacter négativement la demande et générer une réaction politique assez forte, surtout aux Etats Unis. L’OPEP+ pourrait être confrontée à plus de pression en faveur d’augmentations plus importantes lors de la prochaine réunion, prévue le 4 novembre.

En attendant, les catalyseurs à court terme semblent assez rares, et la prudence reste de mise au niveau des investisseurs internationaux.

Evergrande: Un risque « Lehman »?

Se demander si Evergrande est un moment « Lehman » est légitime. Nous nous souvenons tous du « La Grèce ne représente que 2% du PIB de l’Eurozone ».
Quelle est la taille du risque financier direct ? Comment l’effet domino peut-il se propager ? Comment suivre le risque de contagion sur les marchés de capitaux mondiaux ?

Merci de lire le disclaimer

Evergrande est en baisse de plus de 11 % aujourd’hui et a chuté de plus de 80 % cette année. Le groupe a un paiement d’intérêts de 83,5 millions de dollars dû jeudi (23/09) pour une obligation de mars 2022, selon Reuters. Une échéance qu’il semble de moins en moins en mesure d’honorer. Le sentiment des investisseurs asiatiques s’est significativement détérioré, mettant les marchés financiers sur une position de grande fragilité.

Pour le moment, le consensus s’accorde sur un risque de choc économique et écarte celui d’un choc systémique. La faillite d’Evergrande devrait accentuer les difficultés d’une économie chinoise déjà en perte de vitesse depuis quelques trimestres, et impacter le reste du monde sous une forme qui reste à découvrir.

Se demander si Evergrande est un moment « Lehman » est légitime. Nous nous souvenons tous du « La Grèce ne représente que 2% du PIB de l’Eurozone », et les conséquences dramatiques de la crise grecque sur les populations européennes et la cohésion de l’union.

Se doter de quelques indicateurs pour suivre la situation me parait utile plus que futile. Quelle est la taille du risque financier direct ? Comment l’effet domino peut-il se propager ? Comment suivre le risque de contagion sur les marchés de capitaux mondiaux ?

Je tenterai de répondre à ces questions dans ce papier.

Les données de cette analyse proviennent du site Reuters/Refinitiv et sont publiées en Renminbi. La présentation est en dollars avec une parité USD/CNY de 6.45 pour faciliter la lecture.

Quelle est la taille du risque financier direct ?

Il est important de noter qu’un défaut ne donne pas toujours lieu à une perte de 100% du principal. La liquidation des actifs d’un groupe en défaut permet aux créanciers de récupérer une partie de leur capital.

Fitch Rating par exemple assigne une note « Recovery Rating » qui évalue le niveau de capital que les créancier pourraient recouvrer. Pour Evergrande, la note Fitch est de RR6:

Source: Fitch Ratings définition

Ce qui signifie que le taux de recouvrement sur les actifs d’Evergrande est assez faible en cas de défaut.

La dette d’Evergrande est évaluée à 300 Mrds $ à fin 2020,  et se décompose comme suit :

  • 30 Mrds USD détenus par les investisseurs offshores (les étrangers).
  • 150 Mrds USD de dettes fournisseurs et avances clients : Il s’agit de fournisseurs de matériaux tel que le ciment ou les vitres, et les avances des clients acheteurs d’appartements.
  • 120 Mrds USD prêtées par les banques chinoises.

Par devise, les obligations libellées en dollars US émises par Evergrande sont évaluées à 19.5Mrds de dollars selon Reuters, soit 6.5% de la dette totale. La dette offshore en USD est finalement assez faible.

Le risque pèse surtout sur le crédit bancaire.

Source: Refinitiv

Lorsque nous évaluons la dette par maturité, 68 Milliards sont à long terme (dont 19 Mrds d’obligations) . Le reste étant soit une dette long terme arrivant à échéance, un crédit fournisseur, ou les avances des clients.

Extrait de la partie Passif du Bilan d’Evergrande
Source: Reuters

De cette évaluation de l’endettement, nous comprenons que le risque financier pèse surtout sur les parties prenantes locales tel que les banques, assureurs, les clients et les fournisseurs. Cette structure de la dette d’Evergrande doit expliquer la raison pour laquelle les analystes pensent que nous ne sommes pas face à risque systémique mais plutôt un choc économique. Cela dit, ces parties prenantes sont des composantes importantes de l’économie chinoise, les dégâts qu’ils pourraient subir pourraient avoir un effet boule de neige au point d’atteindre le cœur même du système, à savoir des turbulences sur le marché des capitaux et des difficultés du secteur bancaire.

Comment l’effet domino peut-il se propager ?

Les promoteurs immobiliers

L’effondrement d’Evergrande aurait un effet domino sur les autres promoteurs immobiliers de Chine et de Hong Kong.

La société GuangZhou R&F par exemple a vu le prix de son obligation à échéance Janvier 2022 chuter en dessous de 77, et offre un rendement de 104% !

Ou encore le groupe Fantasia, dont l’obligation 2024 atteint un rendement de 58% et dont le prix a chuté en dessous de 42.

Les cours des actions des ces deux groupes a également lourdement chuté, -80% en dessous du pic pour Guangzhou et -70% pour Fantasia, révélant une crainte liée à la continuation de l’activité, et pas seulement des difficultés économiques conjoncturelles.

Immobilier d’hôtellerie et divertissement

Dans un contexte de régulation tout azimuts pour la promotion de la prospérité commune, l’ impact sur tous les secteurs qui allient la promotion immobilière et le divertissement peut être important. Les casinos de Macau par exemple ressentent l’impact de cette combinaison d’évènements qui ne leur sont pas du tout bénéfiques. -60% en dessous du pic 2021 pour Sands China, et Wynn Macau.

Evergrande peut aussi avoir des effets négatifs sur les ménages et entrepreneurs chinois, entrainant une dégradation de leur patrimoine financier et immobilier. Comme j’ai pu vous le présenter dans la structure de la dette du groupe, une grande partie (150 Mrds sur 300) est une dette fournisseurs et avance clients. Ces mêmes ménages se sont endettés pour acheter leur bien, auprès des banques et de leurs familles. Leur mise en difficulté pourrait aboutir à une situation de « Crédit Crunch » qui ne toucherai plus seulement les promoteurs immobiliers mais l’ensemble de l’économie. Nous n’avons pas de données statistiques pour le moment, mais nous entendons déjà l’histoire d’investisseurs vendant à tout prix leurs biens, avec des discount dépassant les 20%. Le crédit crunch est difficile à surmonter comme a pu le révéler la crise de 2008.

La Finance

Le secteur financier est également concerné par la débâcle d’Evergrande sous différents aspects.

Le Hang Seng Financial Index est en baisse de plus de 4% ce Lundi 20/09.

Le premièr aspect concerne l’exposition directe des banques au crédit du groupe. Plusieurs petites banques ont prêté de l’argent à Evergrande. Des banques de taille intermédiaire/importante et cotées en bourse sont également exposées à Evergrande. C’est le cas d’Agricultural Bank of China et China Minsheng Banking Group.

Si nous prenons China Minsheng Banking Group (600016.SS), le groupe a déclaré que les risques liés à son exposition aux prêts accordés à China Evergrande Group (3333.HK) sont « dans une fourchette contrôlable », l’exposition ayant diminué depuis septembre dernier. Cela n’empêche pas le marché d’être inquiet et de sanctionner le groupe lourdement.

La seconde concerne la partie « Wealth Management », plusieurs produits d’épargne chinois contiennent des produits de taux tel que la dette d’Evergrande. Le marché ignore l’ampleur de la propagation de cette dette dans les fonds d’investissement proposés par les gérants de patrimoine chinois.

Dans cette catégorie, l’inquiétude se concentre notamment sur l’assureur Ping An. La semaine dernière, le Financial Times a rapporté que des investisseurs individuels ayant acheté des produits de gestion de patrimoine liés à Evergrande se sont rendus au siège de l’entreprise à Shenzhen pour exiger le remboursement de leur argent. Ping An a publié un communique affirmant: « Pour les entreprises immobilières sur lesquelles le marché est focalisé, les fonds d’assurance PA ont une exposition nulle, ni en actions ni en dettes, y compris China Evergrande ».

L’élément également à ne pas occulter, c’est que les investisseurs chinois investissent très souvent sur marge. Des positions très importantes en bourse souffrent actuellement de leur effet de levier devenu effet de massue, et beaucoup seront acculés à déboucler leurs positions et réaliser leurs pertes.

Sur la partie produits d’épargne, le marché reste méfiant face au caractère inconnu de ce risque, et sanctionne Pin An lourdement. En baisse de 50% par rapport à son pic 2021.

Comment suivre le risque de contagion sur les marchés de capitaux mondiaux ?

Une forte hausse du risque de défaut d’une institution financière Chinoise.

Pour suivre ce risque, il sera intéressant de suivre l’évolution des CDS (Credit Default Swaps, assurance contre le défault), de quelque institutions financières tel que Bank of China, Agricultural Bank of China China ou Minsheng Banking Group,

Si nous prenons le CDS 5 ans de Bank of China, il reste à des niveaux historiquement bas de 46 points de base. Certains pourraient estimer qu’il est beaucoup trop faible vu le contexte, même sans crainte de crise systémique.

Source: Refinitiv
Les conditions de financement en dollars

Ensuite, je suivrais les conditions de financement en dollars, que ce soit en Chine ou dans le reste du monde.

Pour la Chine, je suivrai un indicateur de Swap USD/CNY sur 1 mois. Par exemple le US DOLLAR/CHINESE YUAN OFFSHORE 1 MONTH FX FORWARD SWAP.

Des sociétés de promotion immobilière chinoise, comme nous avons pu le voir avec Fantasia ou Guangzhou, ne sont plus capables d’accéder au marché de financement en USD, avec des rendements requis atteignant jusqu’à 150%.

Nous avons donc un début de contagion sur le marché immobilier chinois.

Source: Refinitiv

Pour le reste du monde, L’USD Libor (London Interbank  offered rate) pourrait être un bon indicateur des conditions de financement en dollars des banques internationales. A ce jour, Cet indicateur ne montre aucun signe de stress sur le marché interbancaire.

Source: global-rates.com
Source: Refinitiv
Le High Yield Européen et Américain :

La situation d’Evergrande a fortement impacté le marché haut rendement asiatique. Surtout qu’une part importante du compartiment High Yield Chinois est composé de promoteurs immobiliers. Le spread high yield s’élargit alors même que les données macro-économiques chinoises restent faibles. Une hausse des taux américains et du dollar suite à la réunion de la FED cette semaine pourrait accélérer le mouvement.

Une contagion du secteur High Yield Européen ou Américain serait un signal d’alerte vis-à-vis du risque de turbulences systémiques sur les marchés de capitaux mondiaux. Pour le moment, aucun signe de contagion n’apparait dans le marché haut rendement US et européen.

Conclusion

Pour conclure, la situation d’Evergrande alimente un mouvement hors des actifs risqués, avec un Sell off généralisé sur les marchés actions internationaux. Cette crise tombe mal en terme de calendrier, avec une baisse des flux actions et un resserement des conditions financière sur les derniers jours du troisième trimestre. La fête nationale « China Golden Week » est prévue pour la première semaine d’octobre (1er au 07 octobre 2021), un période plutôt calme économiquement, qui ne va pas aider à rassurer les marchés.

Pour le moment, la crainte semble plus liée à un choc économique et moins un choc systémique. Mais la configuration de ce choc, et sa capacité à impacter plusieurs pans de l’économie, de l’industrie sidérurgique à la finance, en passant par les ménages, mérite une attention particulière. L’ampleur des crises dépend également de la posture des pouvoirs publiques face à ces difficultés. Le serrage de vis réglementaire en Chine ne semble pas toucher à sa fin. Cet effort de moralisation des entreprises, de réduction de leur levier financier, et « d’investissement pour la prospérité commune »  a certainement joué un rôle dans le coup de froid que subit l’économie chinoise aujourd’hui. La volonté du pouvoir chinois à mettre en place un plan de relance et d’assouplissement monétaire/fiscal sera déterminant, et les mois de Septembre/Octobre seront clé pour la suite de la tendance boursière.

Le cycle économique et la bourse

Comment se comportent les marchés dans les différentes phases du cycle macro-économique?
Une synthèse

Comment se comportent les marchés dans les différentes phases du cycle macro-économique:

Outre le cycle des stocks, il existe un cycle plus long, souvent d’une durée de 9 à 11 ans, appelé cycle économique. Le cycle économique représente les fluctuations du PIB par rapport à la croissance tendancielle à long terme. Un cycle économique typique comporte cinq phases : une Creux/reprise initiale, un début d’expansion, une expansion tardive/ Haut de cycle, un ralentissement et une récession.

EconomiePolitique monétaire et fiscaleConfianceMarchés de capitaux
Creux/reprise initiale.L’inflation continue de baisserPolitiques fiscales de stimulationLa confiance commence à rebondirLes taux courts sont bas ou en baisse ; les rendements obligataires atteignent un plancher ; les cours boursiers sont en forte hausse
Début d’expansionUne croissance économique saine ; l’inflation reste faible Accroître la confianceHausse des taux courts ; stabilité ou légère hausse des rendements obligataires ; tendance à la hausse des cours boursiers
Fin d’expansion/ Haut de cycleL’inflation reprend progressivementLa politique devient restrictiveUne mentalité de boomHausse des taux courts ; hausse des rendements obligataires ; plafonnement des actions, souvent volatiles
RalentissementL’inflation continue de s’accélérer ; la correction des stocks commence La confiance baisseLes taux d’intérêt à court terme atteignent un sommet ; les rendements des obligations plafonnent et commencent à baisser ; les actions diminuent
RécessionBaisse de la production ; pic de l’inflation Confiance faibleBaisse des taux courts ; baisse des rendements obligataires ; les actions atteignent un plancher puis commencent à remonter

Reprise initiale :

Il s’agit habituellement d’une courte phase de quelques mois au cours de laquelle l’économie se remet de son ralentissement ou de sa récession. En général, la confiance des entreprises augmente, bien que celle des consommateurs puisse encore être faible puisque le chômage est encore élevé. Dans la phase initiale de reprise, il y a souvent des politiques économiques stimulantes de la part du gouvernement sous la forme de taux d’intérêt plus bas ou d’un déficit budgétaire. La reprise du cycle économique est généralement soutenue par une remontée simultanée du cycle des stocks, qui est parfois la principale cause de la reprise. L’inflation continuera de baisser dans la phase initiale de reprise. L’écart de production est encore important.

Effets sur les marchés de capitaux :

Les rendements des obligations d’État pourraient continuer à baisser durant cette phase en prévision d’un nouveau recul de l’inflation, mais ils atteignent un plancher. Les marchés boursiers connaissent une forte hausse à ce stade, car les craintes d’une récession plus longue (ou même d’une dépression) se dissipent. Les actifs cycliques – et les actifs plus risqués, tels que les petites actions, les obligations de sociétés à rendement élevé et les actions et obligations des marchés émergents – attirent les investisseurs et affichent de bons résultats.

 Début de l’expansion :

Après la période initiale de reprise, la confiance est en hausse et l’économie prend un certain élan. C’est la période la plus saine du cycle, en un sens, car la croissance économique peut être robuste sans aucun signe de surchauffe ou de forte hausse de l’inflation. En général, la confiance s’accroît, les consommateurs étant prêts à emprunter et à dépenser davantage lorsque le chômage commence à diminuer. Parallèlement, les entreprises accumulent des stocks et intensifient leurs investissements face à la vigueur des ventes et à l’utilisation accrue des capacités. La hausse des niveaux d’exploitation permet à de nombreuses entreprises de bénéficier de coûts unitaires moins élevés, de sorte que les bénéfices augmentent rapidement.

Effets sur les marchés financiers :

Une question clé est de savoir combien de temps il faudra avant que l’inflation ne commence à poser problème. Les taux à court terme augmentent à ce moment, car la banque centrale commence à retirer les mesures de stimulation mises en place pendant la récession. Les rendements des obligations à long terme restent stables ou augmentent légèrement. Les actions continuent d’afficher une tendance à la hausse. Cette phase dure généralement au moins un an et souvent plusieurs années si la croissance n’est pas trop forte et que l’écart de production se referme lentement.

L’expansion tardive :

À ce stade du cycle, l’écart de production s’est refermé et l’économie risque de surchauffer. La confiance est élevée ; le chômage est faible. L’économie peut croître rapidement. L’inflation commence à augmenter, les salaires accélérent à mesure que les pénuries de main-d’œuvre se développent.

Effets sur le marché des capitaux :

Généralement, les taux d’intérêt augmentent à mesure que les autorités monétaires deviennent restrictives. Tout emprunt important exerce une pression sur les marchés du crédit. Les banques centrales peuvent viser un  » atterrissage en douceur « , c’est-à-dire une période de croissance plus lente pour refroidir l’économie, mais pas un ralentissement majeur. Les marchés obligataires observent ce comportement avec anxiété et les rendements obligataires augmentent généralement en raison de l’évolution des attentes. Les marchés boursiers sont souvent à la hausse, mais ils peuvent aussi être nerveux, selon la force du boom. Les investisseurs nerveux signifient que les actions sont volatiles.

Ralentissement :

À ce stade, l’économie ralentit, généralement sous l’effet de la hausse des taux d’intérêt. L’économie est particulièrement vulnérable à ce stade à un choc, qui peut transformer un  » atterrissage en douceur  » en une récession. La confiance des entreprises commence à vaciller. Malgré le ralentissement, l’inflation continue souvent d’augmenter. Le ralentissement est exacerbé par la correction des stocks, les entreprises essayant de réduire leurs niveaux de stocks. Cette phase peut durer quelques mois seulement, comme aux États-Unis en 2000, ou elle peut durer un an ou plus, comme aux États-Unis en 1989-1990 et en 2009-2011.

Effets sur les marchés financiers :

Les taux d’intérêt à court terme sont élevés et peuvent poursuivre leur au début, mais souvent pour atteindre un pic. Les obligations atteignent un sommet au premier signe de ralentissement de l’économie, puis se redressent fortement (baisse des rendements). La courbe des taux s’inverse souvent. Le marché boursier chute, les actions sensibles aux taux d’intérêt, comme les services publics et les services financiers, étant les plus performantes que le reste.

Récession

Une récession est généralement définie comme deux baisses trimestrielles successives du PIB. Il y a souvent un recul important des stocks et parfois une forte baisse des investissements des entreprises. Les dépenses de consommation pour les articles de grande valeur comme les voitures diminuent habituellement (bien que la récession américaine de 2001 ait été une exception). Une fois la récession confirmée, les banques centrales assouplissent leur politique monétaire, mais seulement avec prudence dans un premier temps. Les récessions durent généralement de six mois à un an. La confiance des consommateurs et des entreprises diminue. Les bénéfices baissent fortement. En cas de récession grave, le système financier peut être mis à rude épreuve par des créances irrécouvrables, ce qui rend les prêteurs extrêmement prudents. Souvent, les récessions sont ponctuées de faillites majeures, d’incidents de fraude découverts ou d’une crise financière. Le chômage peut augmenter rapidement, ce qui exerce une pression à la baisse sur l’inflation.

Effets sur les marchés de capitaux :

Les taux d’intérêt à court terme baissent pendant cette phase, tout comme les rendements des obligations. Le marché boursier commence généralement à monter dans les dernières phases de la récession, bien avant que la reprise ne se manifeste. La description donnée des cycles économiques est stylisée. Chaque cycle est différent en raison d’événements et de tendances spécifiques qui ne s’inscrivent pas dans le cadre du cycle économique stylisé. Les tendances qui ont influé sur le cycle économique des années 1990 à la fin des années 2000 comprennent l’importance croissante de la Chine sur les marchés mondiaux, le vieillissement de la population et la déréglementation des marchés. Des événements tels qu’une crise pétrolière ou financière peuvent brusquement faire passer l’économie à la phase suivante du cycle économique ou intensifier la phase actuelle.

Les Terres rares, un risque de disruption majeur.

La guerre technologiques est ouverte. Les Terres rares sont un risque de disruption majeur. La chine controle 90% de la production. AMS, AIXTRON, QUALCOMM ,INTEL sont exposés.

Déjà, les terres rares, c’est quoi ?

Les terres rares sont des composantes cruciales dans la fabrication des composants électroniques et très largement utilisés dans le secteur des semi-conducteurs.

Les matériaux que nous appelons terres rares sont composés de 17 éléments : le scandium, yttrium, et 15 lanthanides. Ils sont utilisés pour faire des batteries, des lasers, des LED, des aimants et amplificateurs, des lasers chirurgicaux, des détecteurs, des tablettes, voiture hybride, ampoules, écrans, équipements de chirurgie, lunettes de soudure. Vous l’aurez compris, ils sont nécessaires partout, partout, partout.

source: Gregoire Favet, BFMTV

Si vous souhaitez en savoir plus sur le sujet, regardez ce long reportage d’Arte sur les terres rares:

Sinon continuez la lecture plus bas

La Chine contrôle 90% de la production mondiale de terres rares :

La chine a le contrôle sur les matériaux les plus critiques pour la supply chain de la filière électronique.

Ils produisent 95% du Gallium dans le monde, composant utilisé dans les amplificateurs que nous trouvons dans tous les casques de musique. Il est également utilisé pour la production d’ampoules LED, les lasers et les stations 5G. La chine contrôle également plus de 80% de la production de Tungsten, utilisée dans les transistors. Ou encore la production de Germanium, dont ils contrôlent plus de 65% de la production, et utilisé dans les radars et les équipements d’optique et optoélectronique.

Une réduction des quotas, ou des restrictions d’exportations :

La domination de la Chine inquiète les occidentaux depuis plusieurs années déjà. De 2006 à 2010, la Chine a réduit ses quotas d’exportation de 5 % à 10 % par an, et la production a été limitée de peur que ses réserves ne s’épuisent d’ici quinze ans. En 2009, la Chine a annoncé vouloir réduire ses quotas d’exportation à 35 000 tonnes (sur une production de 110000 tonnes). Elle a effectivement mis cette menace en application, avec une baisse de 10% en 2011.

Mais après une plainte déposée par l’Union européenne, les États-Unis et le Mexique à la fin de 2009, l’OMC condamne le 7 juillet 2011 la Chine à mettre un terme aux quotas imposés pour les terres rares. La Chine a mis fin au début 2015 aux quotas à l’exportation qu’elle avait imposés sur les terres rares ; ces quotas seront remplacés par un régime de licences qui seront nécessaires aux producteurs chinois pour vendre à l’étranger.

Terres rares dans le monde

Source: http://www.researchgate.net

Au vue de l’importance qu’accorde le gouvernement américain actuel aux règles de l’OMC, pas sûr que l’organisation puisse mettre la pression cette fois sur la Chine, si elle venait à appliquer des quotas à nouveau.

Face à ce risque, le reste du  monde cherche à diversifier ses approvisionnements. La réouverture de la mine sud-africaine est à l’étude. Certains gisements canadiens (Hoidas Lake), vietnamiensaustraliens et russes sont aussi en cours d’évaluation. Et en Suède, un projet significatif est en cours à Norra Kärr.

En 2013, la société australienne Lynas a ouvert une mine en Malaisie. La mine californienne de Mountain Pass a été rouverte après 10 ans de fermeture et après des investissements de 1,25 milliard de dollars. À terme, ces deux sites devraient représenter 25 % de la production mondiale

Quels sont les entreprises les plus exposées :

Conclusion :

Historiquement, les guerres commerciales ont montré qu’elles généraient plus de peine que de bénéfices pour les parties prenantes. Au vu de l’ampleur des pays engagés dans l’affrontement, pas moins que la première et seconde puissance économique mondiale, cette guerre s’annonce être une vrai disruption pour la chaîne logistique mondiale et un casse-tête pour les directeurs d’achats et sales managers des entreprises du monde entier. Elle peut avoir également un impact sur l’inflation, spécialement sur les produits électroniques. Une inflation qui accéléré réduit les marges de manœuvre des banques centrales.

La guerre technologique est ouverte :

Guerre technologique et terres rares, le risque de disruption est majeur

La guerre commerciale a son mur de fer : L’électronique

Google coupe ses services sous licence à Huawei. L’annonce a eu l’effet d’une bombe, encore plus que l’événement dont elle est la conséquence à savoir le placement de Huawei sur liste noire américaine.

La décision du gouvernement américain a été tellement dramatique que même ce dernier a décidé de reculer en accordant un sursis de 3 mois à l’entreprise et appelant les dirigeants de Google pour leur signaler qu’ils n’étaient pas obligés d’aller aussi vite.

Petit décryptage du journal LesEchos

Nous avons eu l’occasion de voir le dirigeant de Huawei, Ren Zhengfei s’exprimer, ce qui n’est pas très commun. Sorti défendre son groupe, il a tenu à calmer les parties prenantes sur la viabilité du segment mobiles à la suite de cette annonce, et laissé entendre qu’ils travaillent sur leur propre système d’exploitation. Un plan B a été dévoilé, dans un élan de fierté nationale revigoré. Pour rappel, la directrice financière du groupe, Meng Wanzhou, a été arrêtée au Canada le 1er décembre 2018, à la demande des Etats Unis, soupçonnée d’avoir violé les sanctions américaines contre l’Iran.

Les systèmes Android sont déjà restreints en Chine, certes. Play Store, Youtube et Google search ne sont pas disponibles, et le Cyberspace Administration of China (CAC) impose des règles strictes d‘utilisation et d’enregistrement des données.  Mais en Europe, cette annonce est sûre d’impacter significativement les ventes du groupe. Comment acheter un smartphone avec un système Android restreint, ou un nouveau système inconnu du public (nous connaissons la qualité des premières versions d’OS)?  Le consommateur européen ne s’embêtera certainement pas de ces contraintes, et s’équipera d’un Samsung ou un Apple.

La décision est lourde.

Le mur digital que la Chine a construit autour d’elle depuis ces 20 dernières années est entrain d’être scellé de l’autre côté par Trump. Comme a dit un blogeur américain sur le sujet : « Cela fait 30 ans que la chine affronte les Etats Unis, il fallait bien qu’elle s’attende à ce que les Etats Unis l’affronte un jour ».

Le modèle « Chimerica » se fissure

L’analyse de Deutche Bank montre que les Etats Unis sont entrain de rediriger leur commerce avec la Chine vers le reste du monde/

La guerre commerciale a un front technologique aux conséquences majeures. Huawei n’est pas la première entreprise que les américains ont mis à genoux. Souvenez-vous, ZTE. Les chinois ne resteront pas passifs. Quitte à se tirer dans les pattes, ils ne seront pas seuls à souffrir. Comment répliquer ?

Le président Xi Jinping veut préparer les chinois à un bras de fer avec les Etats Unis, et liste les cartes dont il dispose pour peser sur la balance. Il en appelle aussitôt à la fierté nationale. Mardi (21 mai 2019), il appelle les chinois à une longue marche, faisant référence à la longue marche de l’armée rouge en 34-36. Cette guerre commerciale est une opportunité politique pour le gouvernement chinois. Il est communément admis qu’un adversaire commun réunit la nation, et ces tensions pourraient permettre de préparer les chinois à un atterrissage de l’économie en dessous des 6% de croissance. Même si les dernières mesures, à visée de court terme, utilisent les anciennes ficelles de l’endettement pour stimuler la croissance, ces tensions pourraient également permettre une accélération de la réorientation de la chine vers une économie de la demande.

 « Nous sommes venus ici, au point de départ de la Longue Marche, pour avoir un aperçu de la situation du départ de l’Armée rouge à cette époque. Il y a maintenant une nouvelle Longue Marche et nous devrions prendre un nouveau départ », a déclaré M. Xi dans un parc commémoratif de Ganzhou, dans le comté de Yudu.

M. Xi s’est rendu à JL MAG Rare-Earth Co, une société de haute technologie basée à Ganzhou spécialisée dans la recherche et le développement (R&D) sur les matériaux magnétiques permanents pourvus de terres rares. Oui les terres rares, fallait bien y arriver.

Les Terres rares, un risque de disruption majeur.

Déjà, les terres rares, c’est quoi ?

Les terres rares sont des composantes cruciales dans la fabrication des composants électroniques et très largement utilisés dans le secteur des semi-conducteurs.

Les matériaux que nous appelons terres rares sont composés de 17 éléments : le scandium, yttrium, et 15 lanthanides. Ils sont utilisés pour faire des batteries, des lasers, des LED, des aimants et amplificateurs, des lasers chirurgicaux, des détecteurs, des tablettes, voiture hybride, ampoules, écrans, équipements de chirurgie, lunettes de soudure. Vous l’aurez compris, ils sont nécessaires partout, partout, partout.

Si vous souhaitez en savoir plus sur le sujet, regardez ce long reportage d’Arte sur les terres rares:

Sinon continuez la lecture plus bas

La Chine contrôle 90% de la production mondiale de terres rares :

La chine a le contrôle sur les matériaux les plus critiques pour la supply chain de la filière électronique.

Ils produisent 95% du Gallium dans le monde, composant utilisé dans les amplificateurs que nous trouvons dans tous les casques de musique. Il est également utilisé pour la production d’ampoules LED, les lasers et les stations 5G. La chine contrôle également plus de 80% de la production de Tungsten, utilisée dans les transistors. Ou encore la production de Germanium, dont ils contrôlent plus de 65% de la production, et utilisé dans les radars et les équipements d’optique et optoélectronique.

La chine pourrait réduire les quotas d’exportations :

La domination de la Chine inquiète les occidentaux depuis plusieurs années déjà. De 2006 à 2010, la Chine a réduit ses quotas d’exportation de 5 % à 10 % par an, et la production a été limitée de peur que ses réserves ne s’épuisent d’ici quinze ans. En 2009, la Chine a annoncé vouloir réduire ses quotas d’exportation à 35 000 tonnes (sur une production de 110000 tonnes). Elle a effectivement mis cette menace en application, avec une baisse de 10% en 2011.

Mais après une plainte déposée par l’Union européenne, les États-Unis et le Mexique à la fin de 2009, l’OMC condamne le 7 juillet 2011 la Chine à mettre un terme aux quotas imposés pour les terres rares. La Chine a mis fin au début 2015 aux quotas à l’exportation qu’elle avait imposés sur les terres rares ; ces quotas seront remplacés par un régime de licences qui seront nécessaires aux producteurs chinois pour vendre à l’étranger.

Terres rares dans le monde

source: http://www.researchgate.net

Au vue de l’importance qu’accorde le gouvernement américain actuel aux règles de l’OMC, pas sûr que l’organisation puisse mettre la pression cette fois sur la Chine, si elle venait à appliquer des quotas à nouveau.

Face à ce risque, le reste du  monde cherche à diversifier ses approvisionnements. La réouverture de la mine sud-africaine est à l’étude. Certains gisements canadiens (Hoidas Lake), vietnamiensaustraliens et russes sont aussi en cours d’évaluation.

En 2013, la société australienne Lynas a ouvert une mine en Malaisie. La mine californienne de Mountain Pass a été rouverte après 10 ans de fermeture et après des investissements de 1,25 milliard de dollars. À terme, ces deux sites devraient représenter 25 % de la production mondiale

Quels sont les entreprises les plus exposées :

Conclusion :

Historiquement, les guerres commerciales ont montré qu’elles généraient plus de peine que de bénéfices pour les parties prenantes. Au vu de l’ampleur des pays engagés dans l’affrontement, pas moins que la première et seconde puissance économique mondiale, cette guerre s’annonce être une vrai disruption pour la chaîne logistique mondiale et un casse-tête pour les directeurs d’achats et sales managers des entreprises du monde entier. Elle peut avoir également un impact sur l’inflation, spécialement sur les produits électroniques. Une inflation qui accéléré réduit les marges de manœuvre des banques centrales.

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