Ils s’appellent Elliott, TCI ou Third Point. Certains sont des stars du marché comme Carl Icahn, Nelson Peltz ou Daniel Loeb. Et quand ils interviennent, le monde des affaires tremble.
On aime les appeler « Vautours » et s’intéressent de plus en plus à la France. Les grosses capitalisations ne leur font plus peur et s’attaquent désormais aux gros poissons. Le groupe de spiritueux Pernod Ricard est la cible du fonds activiste new-yorkais Elliott, le réassureur Scor se trouve dans le viseur de Ciam, Amber Capital détient désormais plus de 5% du capital du groupe Lagardère et Searchlight Capital Partners a annoncé racheter une participation de 26% dans l’équipementier aéronautique Latécoère.
En quoi consiste leur approche ? Qui sont leurs cibles ? Quelles sont leurs tactiques ? Comment le marché y répond ?
La stratégie
Les investisseurs activistes se spécialisent dans la prise de participation dans des sociétés cotées en bourse puis dans la promotion de changements dans le but de générer un gain sur l’investissement. L’investisseur peut souhaiter obtenir une représentation au conseil d’administration de la société ou utiliser d’autres mesures en vue de procéder à des modifications de la structure stratégique, opérationnelle ou financière. Dans certains cas, les investisseurs activistes peuvent soutenir des activités telles que la vente d’actifs, des mesures de réduction des coûts, des changements de direction, des modifications de la structure du capital, des augmentations de dividendes ou des rachats d’actions. Les activistes – y compris les Hedge Funds, les fonds de pension publics, les investisseurs privés et autres – varient considérablement dans leurs approches, leurs compétences et leurs horizons d’investissement. Ils peuvent également rechercher des résultats différents. Ce qu’ils ont en commun, c’est qu’ils plaident pour un changement dans leurs entreprises cibles.
L’activisme des actionnaires suit généralement une période de filtrage et d’analyse des opportunités sur le marché. L’investisseur examine généralement un certain nombre de sociétés en fonction de divers paramètres et effectue une analyse approfondie de l’activité et des opportunités de déblocage possibles. Plutôt que de poursuivre une stratégie d’OPA, les investisseurs activistes visent à atteindre leurs objectifs avec des participations moins importantes, généralement inférieures à 10%. L’horizon temporel des investisseurs activistes est souvent plus court que celui des investisseurs, mais l’ensemble du processus peut durer plusieurs années.
L’activisme des actionnaires (ou des investisseurs) n’est en aucun cas une nouvelle stratégie d’investissement. Ses fondements remontent aux années 1970 et 1980 aux Etats unis, lorsque des investisseurs connus sous le nom de « Corporate raiders » ont pris d’importantes participations dans des sociétés afin d’influencer leurs opérations, de débloquer de la valeur pour les sociétés cibles et d’accroître ainsi la valeur de leurs actions. Les partisans de l’activisme font valoir qu’il s’agit d’une activité importante et nécessaire qui permet de surveiller et de discipliner la gestion d’entreprise au profit de tous les actionnaires. Les opposants soutiennent que de telles tactiques interventionnistes peuvent être source de distraction et avoir un impact négatif sur les performances de la direction.
Les cibles des activistes
En moyenne, les entreprises ciblées affichent une croissance plus lente de leurs revenus et de leurs bénéfices que le marché, subissent une dynamique négative du cours de leurs actions et ont une gouvernance d’entreprise inférieure à la moyenne. En accumulant des parts et en initiant des changements dans les entreprises sous-performantes, les activistes espèrent générer de la valeur. En outre, en ciblant ces sociétés, les investisseurs activistes ont plus de chances de gagner le soutien des autres actionnaires et du grand public. Traditionnellement, les sociétés cibles étaient des actions cotées de petite et moyenne taille. Cela a changé depuis qu’un certain nombre de grandes entreprises sont devenues des cibles des activistes.
Caractéristiques des cibles:

Le processus d’une stratégie activiste

Les tactiques activistes:
- Demander une représentation et des nominations au conseil d’administration.
- S’engager avec la direction en écrivant des lettres appelant à expliquer les modifications suggérées.
- Participer aux discussions entre la direction et les analystes ou en rencontrant l’équipe de direction en privé.
- En lançant des « proxy contests » dans lesquels les activistes encouragent les autres actionnaires à leur donner procuration sur leurs votes pour effectuer un changement dans l’organisation.
- Proposer des modifications significatives de l’entreprise lors de l’assemblée générale annuelle.
- Proposer une restructuration du bilan afin de mieux utiliser le capital et potentiellement initier des rachats d’actions ou augmenter les dividendes.
- Réduire la rémunération de la direction ou réaligner la rémunération de la direction avec la performance des actions.
- Lancer des poursuites judiciaires contre la direction existante pour manquement à ses obligations fiduciaires.
- Contacter les autres actionnaires de la société pour coordonner leurs demandes.
- Lancer une campagne médiatique contre les pratiques de la direction existantes.
- Demander la rupture d’un grand conglomérat pour débloquer de la valeur.
Comment le marché réagit aux attaques des activistes
Les investisseurs réagissent généralement positivement aux annonces d’activisme: en moyenne, les actions des sociétés cibles ont augmenté de 2% le jour de l’annonce (en se basant sur tous les événements activistes de la base de données Thomson Reuters Corporate Governance Intelligence de 1987 à 2016). De plus, la réaction positive s’ajoute à l’appréciation des actions avant les annonces d’activisme. Selon le modèle de Maug (1998), les investisseurs activistes négocient un titre avant l’annonce pour constituer une participation, revendiquer le contrôle et tirer profit de la création de valeur. On peut également soutenir qu’il doit y avoir une fuite d’informations sur l’implication des activistes, ce qui fait grimper le titre avant même la première annonce publique. Il y a une légère inertie après l’annonce: dans le mois qui a suivi l’annonce de l’activiste, les cours des actions cibles ont augmenté de 0,6% en moyenne par rapport au marché.(source : CFA Institute)